KIRK L'INDOMPTABLE

Publié le par Michel Durant

La Mort va vaincre le Chevalier de retour de la Croisade

On le sait,  la fin, c'est toujours la Mort qui gagne. Que ce soit au cinéma, chez Bergman, dans Le 7e Sceau, ou dans la vie réelle, l'être humain meurt. Mais, à 103 ans , le dernier combat de Kirk Douglas a été aussi libre que celui d'El Perdido, de Spartacus et de Van Gogh, aussi farouche que ceux des Sentiers de la Gloire, de Règlement de comptes à OK Corral, Le Champion, Le Gouffre aux Chimères, aussi passionné que dans Les Ensorcelés, Ulysse, L'Homme qui n'a pas  d'étoile, aussi digne que les héros de Seuls sont les Indomptés, Sept jours en Mai, L'Arrangement

Dans El Perdido, Kirk a caché sa fossette sous le savon à barbe (mais pas son imposante carrure) 

Kirk Douglas, c'est l'homme aux 91 films que je place au panthéon de mes favoris pour l'Oscar du Paradigme cinématographique avec Marilyn Monroe, Jack Lemmon, Katharine Hepburn, Cary Grant, Ava Gardner, Spencer Tracy… (je n'en oublie aucun(e) mais je ne veux pas remplir cette page de noms de vedettes de cinéma et chacun(e) pourra ajouter ses préféré(e)s à la liste). On le connaît surtout grâce à ses films mais il a d'abord été comédien de théâtre où il côtoya Lauren Bacall, Barbara Stanwick et Robert Mitchum.

Rome et ses légions tremblèrent devant la révolte des esclaves conduite par Spartacus

Le Fils du Chiffonnier* juif russe qui a écrit lui-même sa biographie est un vrai héros grec. Il a conquis la gloire à la force de ses poings, grâce à la présence d'une fossette inoubliable au menton et à l'énergie farouche qui l'anima toute sa vie. Vaincre les préjugés, imposer ses idées peu orthodoxes, défendre ses amis au risque de briser sa carrière (Dalton Trumbo, par exemple, scénariste empêché de travailler par le maccarthysme, écrivit le scénario de Spartacus grâce à lui). *Mémoires de Kirk Douglas aux Presses de la Renaissance.

Le cow-boy indompté refuse les barbelés et les prisons de toutes sortes. Et la fossette se voit même mal rasé.

C'est aussi un citoyen exemplaire dont la vie est un roman. Il ne se contenta pas d'interpréter des personnages à l'écran, il produisit aussi des films aussi courageux que Les sentiers de la Gloire (interdit en France jusqu'en 1975) et déclarait volontiers : "La guerre est une perte de temps imbécile". Il était tout aussi sévère à l'égard de la religion : "Dieu m'a abandonné à l'école du dimanche lorsque j'ai lu l'histoire d'Isaac et d'Abraham. Le petit garçon terrorisé me ressemblait terriblement." Très loin de la "morale" qui triomphe aujourd'hui aux USA avec Trump et ses acolytes, il interrogeait : "Qui est plus dangereux pour la société, un junkie qui vole pour se procurer de la drogue ou un banquier qui vole pour se procurer des complets à mille dollars ?"

Le capitaine qui mène ses hommes au combat et les défend devant le Conseil de Guerre. Un hommage aux Fusillés pour l'exemple de 14-18

Le mieux à faire pour rendre hommage à ce grand acteur, homme honorable, c'est de voir et revoir ses films. Je conseille El Perdido de Robert Aldrich (le summum de tous les westerns), Les sentiers de la Gloire de Stanley Kubrick (le summum des films de guerre et antimilitaristes)Seuls sont les Indomptés de David Miller (le summum  des films sur la liberté de l'homme face au Progrès technique).

Dans La Vallée des Géants, Kirk Douglas campe un homme d'affaires qui compte faire fortune en abattant une forêt de séquoias. Ça vous fait penser à quelque chose ? 

Dans ses Mémoires, Kirk Douglas citait le poète John Neihardt qui me semble d'une brûlante actualité aujourd'hui qu'il vient de mourir :

Vivre mes années dans la chaleur du sang !/ Mourir enivré par le vin du rêveur !/ Ne pas voir cette âme, maison de boue,/ Retourner en poussière, châsse vide.

M'en aller vite comme une chandelle/ Mouchée au plus vif de sa brillance !/Donnez-moi le plein midi et que la nuit soit faite !/ Ainsi voudrais-je partir.

Et accordez-moi, face à l'effroyable Chose/ Un cri d'arrogance pour percer le gris Peut-être !/ Ô être la corde du violon qui joue/ La mélodie du maître et se rompt !

 

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