SI J'ÉTAIS PRÉSIDENT…

Comme je ne ménage guère les responsables politiques, je m'attire parfois des reproches de lecteurs estimant que je manque d'objectivité : "Et toi, qui es si malin, qu'est-ce que tu ferais si tu étais Président de la République ?" Je dois dire d'abord que c'est bien la seule élection à laquelle je n'ai pas participé comme candidat et donc, a priori, je n'ai pas de programme clés en mains pour ce job. Mais, à la réflexion, des artistes professionnels comme Coluche, Yves Montand ou Gérard Lenorman ayant postulé à leur manière, un artiste amateur comme moi, sans prétention, peut bien s'y coller.
Coluche a fait mieux que Président : il a créé les Restos du Cœur !

Dans sa chanson, Gérard Lenorman nomme Mickey Premier Ministre, Tintin Ministre de l'Intérieur, Picsou Ministre des Finances et Tarzan Ministre de l'Écologie. Pas bête. Sauf qu'il place Bécassine au Commerce ce qui ne changerait pas beaucoup ! En 1981, Coluche est plus radical. Il lance un appel parodiant celui du 18 juin 40 : "J'appelle les fainéants, les crasseux, les drogués, les alcooliques…, tous ceux qui ne comptent pas pour les hommes politiques, à voter pour moi… Son slogan est lapidaire : "Jusqu'à présent la France était coupée en 2 , avec moi elle sera pliée en 4 !" Crédité de 16% dans les sondages, Coluche annonce son retrait après 5 mois de fausse campagne où sa seule présence avait fait trembler la Droite et la Gauche ! En 1984, Yves Montand qui, auparavant, avait plutôt soutenu l'URSS et le PCF stalinien, fait un tabac à la télé avec l'émission Vive la crise où il fait l'apologie d'un capitalisme libéral. Il dénonce l'égoïsme des Français vivant au-dessus de leurs moyens et dépendant trop de l'État. Mais il ne va pas plus loin.

Moi, si j'étais Président, à l'heure actuelle, je me ferais tout petit. Discret, agent secret. Surtout que le bilan n'est pas fameux : crise de Benalla, crise des Gilets Jaunes, crise de la réforme des retraites, crise des bavures policières, crise de Benjamin Grivaux, crise de Buzyn, crise du coronavirus… Je n'irais pas parader dans une usine de masques alors qu'il en manque des milliards pour protéger les Français. Je n'irais pas visiter un EHPAD à la veille d'en décider le confinement. Je reporterais les élections municipales au lieu d'en faire un bouillon de culture. Bref, j'aurais fait exactement le contraire d'Emmanuel Macron et j'aurais laissé les médecins soigner les malades, les épidémiologistes programmer des mesures, les régions, les départements et les communes gérer au plus près du terrain les problèmes du terrain.
Et dire que cet homme-là a été élu Président de la République !

Si j'étais Président, j'aurais lu et relu tous les rapports cliniques et historiques sur les épidémies des cent dernières années. J'aurais écouté les spécialistes. J'aurais permis les initiatives individuelles et locales en donnant à leurs acteurs les moyens financiers et matériels pour aller au bout de leurs recherches et de leurs actions. Je n'aurais pas sonné le tocsin de la guerre pour effrayer la population sans lui fournir les moyens de lutter contre l'ennemi : le virus. Et j'aurais envoyé Madame Buzyn en renfort dans un service de réanimation afin qu'elle apprécie la réalité des besoins de l'Hôpital Public.

Mais je ne suis pas Président, heureusement pour moi et pour les Français. Dans deux ans, je n'aurai pas à rendre des comptes aux Français pour ma gestion calamiteuse des crises. On va dépasser aujourd'hui les 10 000 morts. On s'est tu scandaleusement jusqu'au milieu de la semaine dernière sur le bilan des victimes en EHPAD qui atteindra – et dépassera peut-être – la moitié du total des victimes de l'épidémie. On a minimisé puis dramatisé la maladie. Il n'y a pas de pilote dans l'avion, simplement un mauvais acteur de mauvais théâtre. À sa place, plutôt que de monter sur scène, je resterais confiné !