LA RÉINCARNATION DE L'EAU TIÈDE

Publié le par Michel Durant

Ça flingue très fort chez les ex-UMP dans la dernière ligne droite de la Primaire. Hier, sur France Inter, Éric Ciotti, député  et Président du Conseil Départemental des Alpes-Maritimes, porte-parole de Sarkozy, a dénoncé à la fois Juppé et Bayrou dans des termes peu amènes. Le premier, qui fait la course en tête, nettement devant Sarkozy, est sommé "d'opérer une clarification sur son programme et son alliance avec le second, qui le soutient et qui est le traître permanent. Il a trahi ses idées. Il a trahi tout le monde. Il trahira encore." 

Éric Ciotti, lui, est très clair. Le meilleur candidat, c'est Sarkozy. Il est moins clair quand une journaliste lui demande s'il soutiendra Alain Juppé si Sarkozy est battu dans la Primaire de la Droite et du Centre. Il répond d'abord être persuadé que Sarkozy l'emportera. Il répond ensuite tout faire pour empêcher que cette Primaire soit "un hold-up démocratique" avec un vote massif de la Gauche. Il répond enfin, après plusieurs tentatives infructueuses des journalistes pour le ramener à la question, que, bien entendu, il soutiendra Juppé loyalement. On sent bien que ça lui fend le cœur et qu'il fera comme Chirac a "soutenu" Giscard en 1981, comme la corde soutient le pendu.

Juppé, c'est "la réincarnation de l'eau tiède", selon Eric Ciotti qui n'a pas peur des formules imagées. Pas sûr que celle-ci soit bien comprise des électeurs de la Primaire après que le Juppé en question s'est rendu célèbre par sa posture "droit dans ses bottes", bottes qui faisaient penser plutôt aux "eaux glacées du calcul égoïste" de Karl Marx. Éric Ciotti a des excuses pour cette formule aquatique : les eaux de la Méditerranée dans les Alpes-Maritimes sont moins fraîches que celles de l'Atlantique en Gironde.

En tout cas, on comprend bien que pour Éric Ciotti, "le meilleur d'entre nous" ce n'est pas Juppé mais Sarkozy. Il est clair, il a une grande expérience. Il a des convictions. Il n'en varie pas. Les journalistes essaient de mettre le doigt sur les contradictions de Sarkozy installant le Grenelle de l'environnement puis, sifflant la fin de la partie, en déclarant : "l'environnement, ça commence à bien faire". Ou bien encore, prétendant  barrer le chemin au FN mais droitisant son discours pour ramener au bercail ses électeurs.

Ciotti se défend du délit de racolage des électeurs du FN en assurant que lui et son parti sont d'authentiques gaullistes et donc insoupçonnables d'avoir une proximité idéologique avec un parti qui compte dans ses rangs des gens qui ont comploté contre le Général de Gaulle (il ne doit pas en rester beaucoup). Il donne l'exemple du scrutin proportionnel qui "empêche une majorité de se dégager" (ce qui est faux) typique de la Quatrième République (faux aussi), Quatrième République honnie par De Gaulle et les gaullistes alors qu'en 12 années d'existence elle a reconstruit le pays, décolonisé, engagé la création de la Communauté Européenne malgré le blocage des institutions organisé par les gaullistes et les staliniens. Soit dit en passant, De Gaulle a été le premier et le dernier Président du Conseil de la Quatrième République qu'il a créée puis renversée grâce à un coup d'état militaire en Algérie.

Toujours à propos du FN dont l'existence l'agace, Ciotti se dit fier à la fois de n'avoir aucun élu FN au Conseil Départemental des Alpes-Maritimes et aucun migrant de Calais à Nice. Se réjouir d'appliquer chez soi les idées du FN et dire que Sarkozy est le plus sûr barrage contre le FN est étrange. Ce n'est pas l'affichage ou le sigle du parti qui compte (la preuve, les gaullistes ou ce qu'il en reste, en sont à leur sixième avatar depuis le RPF). Ciotti dit que le FN est une impasse mais c'est faux. C'est aujourd'hui un boulevard qui a été ouvert aux néo-fascistes par le RPR et l'UMP à force de déclarations racistes de leurs dirigeants.

Le programme économique de Sarkozy est inconsistant et il préfère "rassembler" sur ses thèmes favoris : l'autorité, la sécurité, l'identité avec, en point d'orgue la déchéance de nationalité pour les terroristes (comme si ceux-ci craignaient la perte de  la nationalité française alors qu'ils n'hésitent pas à se donner la  mort avec leurs victimes !) Moins énervé que Sarkozy mais tout aussi réactionnaire, Éric Ciotti s'en prend alors aux journalistes qui l'interrogent sur le manque de liberté et d'indépendance sur les chaînes de Bolloré (grève à I télé). Il estime que les journalistes du service public mènent une campagne de dénigrement de Sarkozy et ne sont donc pas indépendants ni objectifs. Conclusion : hors de Sarkozy, point de salut. On s'attend à ce que, bientôt, il marche sur les eaux... tièdes.

1-Éric Ciotti, lisse de partout, calme en toutes circonstances mais sous l'air impassible bout une cocotte-minute.

2-Éric Ciotti, la pédagogie en faveur de Sarkozy.

3-Une pédagogie mesurée au plus près, avec des mots simples pour toucher la ménagère de 50 ans.

4-Sur France Inter, le poisson semble plus grand, tout comme le mensonge.

5-À la tribune de l'Assemblée Nationale, le poisson est encore plus grand.

6-À l'Assemblée Nationale, Éric Ciotti n'en fait pas lourd et regarde le photographe.

7-Le trio sarkozyste est concentré. Trois regards différents. Éric Ciotti regarde le photographe.

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Merci pour le lien mais comment fait-on pour s'abonner ?
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