PEAU, DRAPEAU ET ORIPEAUX

Publié le par Michel Durant

Les deux complices (ça a commencé en 1993 pour les Législatives)

Hier, comme d'habitude (à deux exceptions près), j'étais à la manifestation contre la réforme des retraites à Vichy. J'avais ma petite pancarte et ma copine Danièle, que j'avais covoiturée, portait un étendard multicolore de belle taille : sept bandes horizontales violet en haut et rouge en bas. Les couleurs de l'arc-en-ciel avec l'inscription PAIX au milieu. Le drapeau  des pacifistes. Utile et démonstratif au moment où le mot retraite a été remplacé dans les comptes rendus des manifestations par le mot violence au singulier ou au pluriel.

Vous avez dit : l'imagination au pouvoir ? Autre drapeau, autre couleur.

Une manif bon enfant à l'itinéraire inhabituel : Avenue Paul-Doumer, Place Victor-Hugo, Rue Wilson, Rue Lucas, 4 Chemins, Rue Jean-Jaurès, Avenue Victoria (long arrêt devant le commissariat  de police pour réclamer la libération de manifestants de la semaine précédente), Rue Beauparlant, Rue de Paris, Place de la Gare, Avenue Doumer et fin Place de l'Hôtel de Ville. Du classique : des chants, des slogans, du spectacle de rue, des interviews de journalistes, des discussions avec copains et copines, commentaires et photos des pancartes peu amènes à l'égard de Macron, Borne et Dussopt…

Même un Yoda venu de l'Espace peut porter le drapeau pacifiste !

Après la dispersion, nous allons rejoindre la voiture sur le parking au bord des parcs et, au carrefour de l'Avenue des Célestins et de la Rue Lyautey, nous devons nous arrêter car quand c'est aux voitures de passer c'est pas aux piétons de traverser (comme chantait Annie Cordy). Un grand jeune homme entreprend Danièle pour lui  reprocher de porter le drapeau gay. Poliment, Danièle lui fait remarquer que le drapeau gay a six bandes quand le sien en a sept, porte le mot PAIX, et que les couleurs horizontales sont inversées. Armé de son smartphone (une béquille pour beaucoup de jeunes qui y recourent comme des vieux qui ont de la peine à marcher s'appuient sur une canne), il cherche à prouver qu'il a raison.

Le boutonneux ne s'est pas attaqué aux drapeaux de la CGT brandis par des costaux qui n'auraient pas été aussi patients que Danièle… Photo F. Baffier

Ouf, le feu passe au vert pour les piétons et nous poursuivons en direction de la bagnole. Arrivés au Pôle Universitaire Lardy, le mec nous rattrape (sans peine avec ses mollets de jeune coq alors que nous venons de nous taper deux bons kilomètres et deux heures de station debout) et reprend sa controverse avec Danièle ! Il n'en démord pas : ce drapeau est le drapeau des homos et il n'a rien à faire dans cette manifestation, bla-bla-bla. Je me décide à intervenir : même si c'était le drapeau gay (ce qu'il n'est pas) rien n'interdit à quiconque de porter le drapeau gay, cher monsieur. Le cher monsieur ne l'entend pas de cette oreille et entame une leçon de morale catho intégriste : le Bien, le Mal, bla-bla-bla. On y serait encore si nous n'avions pas décidé de continuer vers la voiture, notre bouée de secours face à l'intégrisme de cet ado boutonneux au raisonnement infantile dont l'acné juvénile contribue sans doute à ce qu'il  soit mal dans sa peau et en veuille au monde entier. J'aurais dû lui sortir cette citation de Françoise Giroud pour lui clouer le bec : "Nous avons fait de Dieu une illusion attardée sous les oripeaux de la morale dite chrétienne". Mais je ne suis pas sûr que cela l'aurait convaincu qu'il se fourrait le doigt dans l'œil jusqu'au coude. Rendez-vous dans les rues de Vichy la semaine prochaine avec ou sans drapeaux !

Une image d'espoir (verte) de F. Baffier

 

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