LE DERNIER RIVAGE

Publié le par Michel Durant

Un long baiser panoramique de deux minutes entre les vedettes…

C'est le titre d'un  film de Stanley Kramer, sorti en 1959, qui raconte l'histoire des derniers survivants de la Troisième Guerre Mondiale, guerre atomique évidemment. Le dernier rivage est celui de l'Australie – qui n'a pas encore été touchée par les radiations mortelles – d'où part un sous-marin américain commandée par Gregory Peck qui va à la rencontre d'un message Morse émis depuis les côtes californiennes laissant supposer qu'il existe encore des survivants…

…et ce message final : il est encore temps, frère, encore temps de faire la paix, pas la guerre

Je n'ai pas revu ce film depuis sa sortie qui m'avait fait forte impression, en pleine guerre froide (et en pleine Guerre d'Algérie), à un moment où le monde était partout au bord de l'explosion finale. On se doute que l'affaire des sous-marins australiens qui agite les gouvernants français m'a remis en mémoire ce film magistral et replace cette tambouille politico-financière à sa juste place : un conflit commercial entre des amis marchands d'armes.

Léotard et Balladur au temps de leurs affaires de sous-marins à Karachi 

56 milliards d'euros, ce n'est pas rien. On parle, une fois de plus, de "contrat du siècle". Décidément les journalistes n'ont rien à envier aux hommes politiques qui aiment tout autant la cerise sur le gâteau que le gâteau lui même. Et ce gâteau est juteux, énorme, providentiel. On se souvient que c'est déjà un contrat de fabrication-vente de sous-marins qui avait provoqué l'attentat de Karachi où, à cause de rétro-commissions non versées, 11 techniciens français avaient perdu la vie et où, 20 ans après les faits, l'ancien  Ministre  de la Défense Léotard avait été condamné à 2 ans  de prison avec sursis (il a fait appel en Cassation).

Contrat cassé, vitrine brisée

La France a perdu un contrat de vente d'armements. Le Quai d'Orsay crie à la trahison, au mensonge, à la duplicité. Moi je dis que les trafiquants d'armes sont des scélérats qui gagnent des millions ou des milliards en pariant sur la mort de milliers ou de millions de personnes. Ce n'est pas parce qu'ils sont ministres ou présidents que ces hommes sont moins coupables que les malfrats marseillais ou new-yorkais qui fourguent des kalachnikovs aux dealers. Ils vendent la mort des autres pour se faire une vie très confortable. Quand leurs concurrents leur volent des clients, ils crient à la trahison. Mais ce ne sont que les lois de la jungle capitaliste, camarades flingueurs !

L'ouvrier de Naval Group a bon dos !

La Ministre des Armées pleure sur le sort des travailleurs de l'entreprise NAVAL GROUP (ex-DCN privatisée) mais ce groupe industriel français qui est contrôlé à plus de 60% par l'État n'a que 500 salariés concernés par le contrat australien sur près de 16 000 emplois dans le monde ! De plus, son PDG qui vient de prendre sa retraite s'est vanté que les carnets de commande de son entreprise sont pleins pour plus de dix ans (hormis le fameux contrat australien). Et si les marchands d'armes français perdent des contrats, ils n'ont qu'à s'orienter vers d'autres productions. Par exemple, il est très difficile de trouver sur le marché des râpes à fromage, des pinces à vélo ou des casse-noisettes* solides et fonctionnels. Fabricants d'armes, faites comme les agriculteurs lassés d'utiliser des pesticides cancérigènes et qui se convertissent au bio. Au lieu de vendre la mort, offrez la vie ! *Autres pistes : les vélos, skate-boards, planches à voile, parapluies, sacs à dos…

Les photos de guerre sont terribles mais il y en a de bien pires…

La France est un des plus grands marchands d'armes au monde. Ses principaux clients se trouvent au Moyen-Orient : Arabie Saoudite, Émirats, Égypte… Ses avions, ses canons, ses missiles servent actuellement à anéantir les populations et les bâtiments du Yémen pris en otages dans la guerre idéologique que se livrent chiites et sunnites dans la péninsule arabique. À Vichy, dans le  cadre des Journées Albert Londres, Jeannette Bougrab a fait une excellente intervention sur les ventes d'armes françaises  à des  pays despotiques suite à la projection du film d'Anne Poiret : Mon pays fabrique des armes**. On le voit, le problème se pose aussi quand les pays acheteurs ne sont pas despotiques mais seulement cyniques.**Excellent mais incomplet car les armes nucléaires ne sont pas évoquées et quand, au cours du débat, j'ai posé le problème de l'arme atomique française, la réalisatrice s'en est tirée par une pirouette.

Avions Rafale pour l'Égypte : 4 milliards d'euros, merci Sissi !

 

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